Monday, October 18, 2010

the social network de David Fincher


le cinéma s'empare enfin du monde de l'internet, lui donnant ses lettres de noblesse romanesque. Habituellement ces deux mondes s'ignorent, se méfient l'un de l'autre. Le cinéma se sent menacé de dévoration par l'Ogre internet. Et puis difficile de filmer l'informatique au cinéma, de lui donner une représentation spectaculaire intéressante.
De fait, David Fincher, qui continue à proposer un cinéma adulte et réflexif, se confrontant aux questions contemporaines, propose de raconter l'histoire de la création de facebook, en se concentrant sur l'itinéraire de son fondateur. Et, comme on pouvait s'y attendre, le portrait est à charge, plutôt féroce (encore que ça aurait pu être pire). Le monde des producteurs de cinéma,encore une fois, a une peur bleue d'internet, et des jeunes esprits surdoués qui l'animent, ces nouveaux maitres du monde. Pas étonnant que le film nous offre une vision acide du créateur de Napster, qui a lancé la mode massive des téléchargements de musique et de films. Le diable absolu pour les professionnels du cinéma.
Le premier intérêt d'un film de cinéma traditionnel pour un tel sujet, c'est précisément d'apporter de l'humanité, des visages, de la chair, des passions à quelquechose qui en est singulièrement dépourvu. quels sont les enjeux humains, c'est à dire affective, qui se cachent derrières nos machines, nos écrans, derrière ce monde hautement technologique. Pour Fincher et son scénariste, le but de la fiction ici est de traquer, de dénicher le substrat humain immuable, ce qui résiste, ce qu'on ne peut programmer...
A travers un récit, qui nous fait donc suivre la création d'une entreprise,The social network est un film sur le capitalisme d'aujourd'hui et le pouvoir de l'argent, son caractère corrupteur des liens humains, adoptant un ton plutôt léger et caustique, le rapprochant d'une certaine tradition hollywoodienne (les films de Capra par exemple). C'est d'ailleurs assez bavard, avec un débit de parole très rapide. Reprenant la figure traditionnelle du film de procés, Fincher et son scénariste cassent la structure narrative entre un avant (naissance de facebook par une bande de potes) et un après (le procés entre les fondateurs)
Or quel message transparait tout au long du film: que la trahison, l'humiliation, la dissimulation, la manipulation sont à la base du capitalisme, en l'occurrence du succès fulgurant de facebook. Mark Zuckerberg n'a en effet cessé de mentir et de trahir, y compris son meilleur ami, pour arriver à ses fins. pas un hasard si le film débute par une scène de rupture suie par Zuckerberg, blessure psychologique, traumatisme qui, nous dit le film, aurait présidé à la création de Facebook. Ce site est né d'une idée de vengeance, inspiré par le ressentiment. Là n'est pas le moindre paradoxe, que cherche à mettre en lumière ce film: un site qui vise a relier les gens a travers le monde est le fruit d'un cerveau solitaire, incapable d'amour et d'empathie, et le succès de cette entreprise est le fruit de la haine et de la division.