L'affaire Wikileaks,véritable feuilleton digne de 24 heures (révélation des fuites, arrestation de Julian assange), storytelling spontanée en temps réel, donne lieu à un débat mondialisé, une nouvelle querelle entre les anti wikileaks et les pro, partisans du secret et apôtres de la transparence. Les anciens seraient du coté du secret, et les modernes de la transparence.
L'ère de la transparence absolue s'inscrit dans la logique même d'Internet, on enjoint les gens à parler d'eux. Il n'y a pas de vie privée dit le créateur de facebook. Et beaucoup adhèrent à ce principe.
Le "fascisme informatique" rapelle la formule de Virilio:la "bombe informatique". Autrement dit, cette transparence totale est lié à la puissance du système technique, dans lequel on est pris et que personne ne contrôle vraiment. Julian Assange est un leurre, destiné à capter l'attention des anti et des pro, et destiné à nous faire croire que le bon vieil être humain contrôle encore les choses (un peu comme quand on arrête un internute qui télécharge).Comme Ben laden, on nous crée une sorte de mythe vivant , un docteur NO qui tirerait les ficelles dans l'ombre.
Or derrière Assange, il y a l'emprise du réseau et des machines. Pas pour rien que Assange a un look a la Matrix. On va sans doute voulaire faire payer le prix fort à cet homme, à titre d'exemple, mais ca ne changera rien. Assange peut être remplaçé demain. Les pro Assange disent souvent qu'il s'agit là d'une évolution irréversible, inévitable. Autrement dit, ce n'est guère la liberté d'expression ou de la presse qui est invoquée mais le contraire: un déterminisme, un destin plaqué sur nous; et ce destin n'est autre que la technologie. Je pense donc que, qu'on soit pour ou contre Wikileaks est secondaire, dans les deux cas, on s'illusionne sur la marge de liberté qu'il reste à l'individu dans un monde entièrement connecté et informatisé. Le problème est systémique et technologique. "Aucune loi ne changera l'équation: il suffit d'un serveur installé à l'étranger (...)nous riqueons d'être conforntés à un pearl harbour électronique" selon une formule d'un républicain américain, James Carafano (le monde du 30/11/2010). C'est pour cette raison qu'en France, Eric besson, ministre en charge du numérique (quid???), assez logiquement, a voulu s'en prendre à l'hébergeur, la société OVH, qui abrite des serveurs où sont stockées certaines données du site. C'est plutôt là, en effet, que réside le noyau des choses. Or il est significatif de constater que le droit comme d'habitude est largué par la technologie. Ainsi OVH affirme n'être que le prestataire technique, et que son système de serveurs est totalement automatique et fonctionne 24H/24. Et d'ailleurs le directeur d'OVH affirme qu'il ignorait que sa société hébergait Wikileaks, à l'égard duquel il se dit ni pour ni contre. Il est la voix de la technique. Autrement dit, pas de responsable humain direct dans ce système (y a t il un pilote dans l'avion?). Et c'est bien pour cela que la justice française n'a pas donné suite aux demandes de Monsieur Besson. Vide juridique donc, qui indique bien cependant que toute cette affaire, et le désordre qu'elle entraine, est d'abord une affaire technologique, révélateur double de la puissance et de la fragilité de ce système qui, donc "est totalement automatique".
Avec wikileaks, surgit l'un des nombreux signes ou symptômes que ce système (qui est technique) est en train de se retourner contre lui même, au sens où la centralisation extrême se fait déborder par une décentralisation extrême. Dans les forums qui débattent de la question, les uns pointent le flicage technique d'en haut (l'état) et les autres, la transparence, délation généralisée d'en bas. Bref, on ne sait pas qui contrôle qui. La vérité, c'est que les états ne contrôlent pas Internet; le paradoxe suprême étant qu'ils exercent leurs pouvoirs grâce à des dispositifs techniques qu'ils ne maîtrisent pas totalement. Et c'est la même chose pour les citoyens bien entendu. Alors ce qui risque de se passer,à l'avenir, c'est que les pouvoirs s'attaquent, non plus à un simple hacker, mais à la technologie même d'Internet, au sens du réseau physique, comme l'initiative de Besson le laisse supposer.
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